Rien ici qui demeure
L’exposition-installation Rien ici qui demeure est une plongée dans le fonds troublé d’images dormantes qu’Alain Willaume a choisi de faire remonter en surface. Créée à la faveur de la résidence « Les Nouvelles Oubliées » par RN7 et à l’invitation du LUX, Rien ici qui demeure laisse entrevoir quelques plis d’une œuvre souterraine proliférante qui, telle un atlas d’incertitude, affronte l’impermanence et met en scène énigmes et rhizomes.
« Les photographies de Willaume semblent être parvenues jusqu’à nous encore marquées par les traces de ses voyages ; elles surgissent des brouillages du temps et de l’espace comme ces moments d’écoute parfaite échappés des parasites d’une radio. Il y a tant de voix à écouter : certaines sont lointaines, d’autres proches et émouvantes, d’autres brouillées, d’autres encore claires et nettes. »
David Chandler
Après plus de 45 ans de pratique photographique, et au creux de la pandémie qui ébranle notre temps, le photographe ouvre des boîtes et réactive quelques disques durs endormis. De quels types d’archives dispose-t-il et quels sens leur donner aujourd’hui ? Comment les remettre en jeu pour en créer un nouveau matériau narratif ? Grâce au temps de réflexion offert par cette résidence originale, Alain Willaume révèle et tisse dans les espaces labyrinthiques de LUX une autre trame possible de son œuvre. Puisée, au gré des hasards et des nécessités, au cœur de sa collection personnelle (cartes postales, coupures de journaux, carnets de voyages, « débris visuels », musiques, films et œuvres originales oubliées ou jamais montrées), cette plongée, partielle et partiale, dans un fonds atypique d’images met à jour quelques strates qui composent le monde intérieur du photographe.
Si la photographie permet indéniablement de glisser vers la littérature, l’œuvre d’Alain Willaume est une source d’inspiration magistrale pour les auteurs de fiction. La rencontre avec Michel Poivert lors de la résidence a permis aux deux auteurs de mêler leurs univers, sombrant délicieusement ensemble dans une dystopie intitulée « La cure Mnémosyne ». Posant la question de la mémoire et de la réappropriation, l’œuvre commune qu’ils présentent pour la première fois sur un des niveaux de LUX s’articule à partir d’images égarées, interprétées par l’historien dans ce qui devient ici une véritable installation.
Annelore Mesnage, commissaire de l'exposition